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Foot à la télé : les chaînes sportives déclarent la guerre au live streaming

Face à la perte continue d'abonnées, les chaînes TV sportives passent à l'offensive contre les sites Web qui diffusent des compétitions en streaming.

Regarder gratuitement un match de foot – ou tout autre événement sportif – diffusé exclusivement sur une chaine de télévision payante ? Rien de plus facile ! Il suffit de taper quelques mots clés dans un moteur de recherche pour trouver des sites Web spécialisés dans ce que l'on appelle le live streaming qui retransmettent en direct des compétitions sportives du monde entier, et souvent en très bonne qualité. Une activité évidemment illégale, à laquelle s'adonnent les LiveTV, Rojadirecta, Stream2watch et autre Arenavision, pour n'en citer qu'une poignée, et qui fait de plus en plus d'adeptes.

Le phénomène n'est pas nouveau – il est apparu au milieu des années 2000. Mais il a pris des proportions inquiétantes ces dernières années. L'institut Médiamétrie, qui suit de près cette tendance, a dénombré plus de 900 sites pirates proposant des contenus sportifs en direct. Et selon une enquête commandée par la chaîne payante BeIN Sports, 3,5 millions de Français regarderaient ainsi des matches de foot sans bourse délier, dont la moitié de façon hebdomadaire. Un nombre impressionnant, qui rejoint les estimations de Médiamétrie – près de 2 millions d'internautes français suivraient chaque mois de compétitions sportives piratées.

Surtout, la tendance se ressent dans l'audience des chaînes sur abonnement : Canal+ aurait ainsi perdu 250 000 spectateurs en moyenne pour sa grande soirée foot du dimanche soir en 2018 par rapport à l'année précédente. Et les abonnements chutent partout. Il faut dire que le foot business, qui reste le principal moteur du sport télévisé, n'arrange pas les choses, avec l'éclatement des droits de transmission qui oblige à multiplier les abonnements ; ainsi, un fan qui souhaite suivre toutes les compétitions des différentes ligues doit doit payer chaque mois près de 55 euros pour s'offrir Canal+, BeIN Sports et RMC Sport. Une somme rondelette qui a du mal à passer à une époque où la question du pouvoir devient brûlante…

Dans ces conditions, il est difficile, pour certains, de résister à l'appel des sites de live streaming qui, non contents de proposer gratuitement des matches de foot diffusent également toutes sortes de compétitions sportives en offrant même parfois des fonctions d'enregistrement. Vivant principalement d'annonces publicitaires pour des paris sportifs ou des contenus pornographiques, ces sites pirates utilisent des techniques très simples pour dupliquer et diffuser leurs contenus en détournant des abonnements payants. Surtout, ils se sont industrialisés ces dernières année, en exploitant de véritables fermes de serveurs installées en Chine ou en Russie, et en rémunérant des intermédiaires chargés de maintenir la connexion, de façon à offrir une qualité équivalente à celle des chaînes à péage. Certains vont même jusqu'à proposer des abonnements payables en bitcoin ou via Paypal ! Mais le plus souvent, ils offrent gratuitement leurs services, les revenus publicitaires suffisant à entretenir de véritables organisations mafieuses disséminées dans le monde entier.

Et ce marché parallèle semble extrêmement lucratif. Selon les relevés d'Idate Digiworld, en juillet 2018, LiveTV aurait plus de 25 millions de visiteurs uniques, devant Rojadirecta (14 millions), Livetvcdn (9 millions), Stream2watch (7 millions), Firstonetv (7 millions), Koras-star (5 millions), Pirlotv Online (4 millions), Arenavision (3,7 millions), Playtv (3,3 millions) et Livefootballol (2 millions). Une manne qui attise les convoitises ! Et qui fait réagir les chaînes françaises payantes, qui voient leur modèle économique se déliter. Réunies depuis un an au sein d'une organisation spéciale, l’Association pour la Protection des Programmes Sportifs (APPS), elles ont décidé de monter au créneau en profitant de la loi sur la réforme de l’audiovisuel. Auditionnées pr le Sénat la semaine dernière, elles souhaitent mettre en place un plan de lutte contre cette forme de piratage, en s'inspirant de ce qui se fait déjà dans d'autres pays (Grande-Bretagne, Portugal…) et en impliquant les fournisseurs d'accès à Internet..

Mais la tâche se sera pas facile face à un système qui s'est bien rodé en se disséminant. D'autant que comme les sites de piratage du genre Zone Téléchargement ou Torrent9, les spécialistes du live streaming changent régulièrement d'extension pour brouiller les pistes et les actions des ayants droit. Et c'est dans une véritable guerre internationale que l'APPS doit se lancer pour maintenir ses revenus. Sans nul doute, l'année promet d'être sportive…

Illustration : © PXhere

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